Nos soirées d’enfance et l'école - 2

Publié le par Marie

Je garde un souvenir particulièrement merveilleux de celle que nous passions en hiver près du phare qui chauffait toute la maison, dans cette vaste antichambre pavée de mosaïque, où l’on mettait la table pour les repas dans le froid de l’hiver. Mon père était un extraordinaire animateur et avait un sens inné de l’éducation je crois; tout ce qu’il nous racontait était passionnant et tellement vivant. Il nous lisait alors les livres d’Erckman Chatrian sur la Révolution et l’Empire: « Mme Thérèse », « le Conscrit de 1813 » et d’autres; ou Ivanohé, Robinson suisse... Nous étions autour de la table autour d’une lampe à pied de marbre et d’un gros palmier en pot, la vieille horloge faisait son tic-tac; la cuisinière Célina, ronde comme une petite boule, passait avec sa lampe pigeon pour aller se coucher au grenier, en disant bonsoir affectueusement. Tout n’était que chaleur et sécurité !

L’été on restait sur la terrasse devant le salon jaune, sous la rosier banque (jaune) où nichait un chardonneret; on regardait les étoiles et souvent l’on chantait. Mon père était musicien et chantait et jouait beaucoup : « Quand dans la nuit sereine brille l’étoile d’or » ou « Une étoile de Dieu brille », « C’est là-bas près du village ». Une année, 1910 je crois, nous admirions la comète de Halley, très visible au-dessus de la montagne de Rachas...

L’enfance paraît longue et pourtant tout a changé en 1914 avec la guerre et je n’avais que 14 ans.

Je garde de cette enfance un souvenir béni. Mes parents s’adoraient et je crois que c’est la base du bonheur, de la sécurité et de l’équilibre des enfants. Le Monde pouvait crouler, d’eux nous étions sûrs ! Et puis il y avait la sécurité d’une éducation religieuse fervente. Maman montait chaque soir après que nos frauleïns nous avaient couché pour nous faire faire notre prière et nous embrasser, et chaque matin Papa faisait le culte dans leur chambre avant que nous ne partions à l’école. Je me revois à genoux, le nez dans la chaise longue de Maman, trouvant que c’était trop long, et que nous allions être en retard à l’Ecole...

L’Ecole : je n’y suis d’ailleurs allée qu’à 10 ans. Jusque-là, nous ne travaillons qu’avec Maman, nos frauleïns, ou Mme Pommaret qui a convaincu notre mère; moderne pourtant pour l’époque; que c’était une pitié de nous élever ainsi à l’écart « du peuple », qu’il y avait là aussi des petites filles très bien que nous gagnerons à connaître...! Ma grand-mère protestait : « elles vont apprendre de vilains mots, attraper des poux... », nous en pleurions presque !

Finalement cette grande Ecole rose de Dieulefit était parfaite : Mlle Thomasine, Mlle Girandier, Mlle Bussy : je n’en garde que de bons souvenirs. Mlle Thomasine surtout nous a marquées, avec son amour de l’histoire et de la littérature qu’elle m’a transmis.

 

Je pourrais me perdre en souvenirs mais, c’est un résumé auquel il faut que je m’applique.

 

 

 

 

 

Publié dans Jeanne Arnal

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