Page 4 Zacharie Arnal

Publié le par Marie

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C'étaient pour nous des moments de douce joie que d'appliquer nos voix enfantines au chant des louanges de Dieu.

A ces exercices de chant s'ajoutait le soir le culte de famille où, après le cantique, nous écoutions tous la lecture de la Bible et la prière, moments bénis qui nous apprenaient de bonne heure à vivre avec Dieu, en sa présence, pour l'aimer et le servir. Vous avez, chers enfants, comme nous, connu ce privilège d'une éducation chrétienne dirigée par un père et une mère pénétrés tous deux d'une sincère et profonde piété. Heureux les enfants qui grandissent sous cette sainte influence.

Devoirs de vie pratique

C'était là le côté élevée de la vie de famille ; c'en était la poésie ; mais la prose n’en était pas négligée pour cela dans les devoirs multiples de la vie quotidienne. Et ces devoirs, dès notre enfance, nous y avons été associés. Il fallait manger du pain, or à cette époque lointaine et dans un village, il n'y avait pas de boulanger, et dans chaque famille c'était la mère qui devait pétrir la pate. Notre chère mère s'astreignait malgré ses nombreuses tâches de mère et de femme de pasteur, à ce travail hebdomadaire très fatiguant, et le jour venu, c'était aux enfants à porter au four banal les paillassons contenant la pâte bienfaisante, bien levée, et l'après-midi à aller chercher les tourtes bien cuites pour les rapporter à la maison. Il y en avait pour toute la semaine, ce qui ne permettait pas de se livrer quotidiennement à la gourmandise du pain frais. La récompense des enfants, c'était de rapporter aussi et de croquer à belles dents, des fougaces, sortes de gâteaux auxquels on consacrait le reste de la pate ; ce n'était pas de la pâtisserie, mais nous nous en régalions quand même. C'est ce qui nous permettait de savourer d'autant mieux les vrais gâteaux d'un ou deux sous que papa et maman nous rapportaient de leurs courses au Vigan.

Avec le pain, il fallait de l'eau. Or l'eau potable n'était pas comme aujourd'hui dans chaque ménage. Le jardin était bien muni d'une citerne alimentée par les eaux pluviales, mais l'eau n'en était pas saine, de là des dangers de maladies. Le village avait, il est vrai, deux sources, l'une à l'extrémité inferieure du village donnant à peine un filet d'eau en été, si bien qu'il fallait bien attendre son tour de 15 à 30 minutes pour présenter sa cruche au robinet qui la remplissait en 10 ou 15. L'autre était située à un bon kilomètre au dessus du village, ou on allait puiser l'eau dans la petite vasque naturelle. C'était le rôle des enfants d'alimenter la maison d'eau potable et fraîche pour les repas.

Aller au four et à la source était déjà un bon exercice de la vie pratique ; mais il y en avait un autre qui ne manquait pas de charme pour les enfants, c'était les grands jours de lessive du linge, trois ou quatre fois par an. Un ménage à cette époque était plus largement monté en linge de toute espèce qu'aujourd'hui. Aussi l'opération de la lessive était-elle plus importante. Ce jour-là, la cuisine, très vaste, se parait près de la cheminée d'un vaste cuveau ou s'engouffrait tout le linge d'un trimestre, et à la crémaillère était suspendu un large chaudron de cuivre, ou bouillait l'eau que l'on versait sur les cendres dont le cuveau était recouvert. C'était l'opération du « coulage » dont était chargée une femme

du village. Le lendemain c'était l'opération du lavage, qui se faisait à la rivière. Or, la rivière coulait au bas de la colline

du village, et pour y aller, il n'y avait guère que des sentiers étroits. C'est par ces sentiers que nous étions appelés à transporter par petites corbeilles, le linge sortant du cuveau, pour …

Publié dans Jeanne Arnal

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