1871 - Un récit sur la Commune - 6

Publié le par Marie

Mes arrières grands-parents Charles Dumas vivaient à Paris, rue d’Hauteville, je crois, face à l’église St Vincent de Paul. Ils avaient 6 enfants vivants; (un fils Jean était mort à 20 ans de la tuberculose). Ma grand-mère Lucie était déjà mariée ainsi que sa sœur Marie Peugeot; mais il y avait des garçons célibataires dont Louis qui vivait chez ses parents ainsi que les plus jeunes Zabeth et Henri. La guerre civile faisait rage. Les communards avaient incendié l’Hôtel de ville, les Tuileries sous les yeux des allemands goguenards; et bien d’autres bâtiments encore. On présente cela maintenant comme un sursaut national contre la capitulation honteuse ?

Je sais seulement que ma grand-mère parlait de cette période avec horreur ! Un jour, apprenant par la concierge qu’il y avait dans la maison un garçon en âge de se battre les insurgés envahissent l’immeuble recherchant une recrue de plus. Grand Maman Dumas qui était une maîtresse femme pousse son fils dans sa chambre, le fourre au lit tout habillé, tire les rideaux et le couvre jusqu’aux yeux d’un énorme édredon rouge. Vociférant des hommes arrivent : « Où est-il se froussard, il nous faut du monde ! » et ils envahissent l’appartement menaçant de tout casser, et de fouiller partout. Ma grand-mère tragique s’interpose : « Malheureux ! il y a la fièvre typhoïde ici, n’entrez pas, mon fils est très mal. » Interloqués les hommes s’arrêtent sur le seuil de la porte; voient mon jeune oncle cramoisi sous son édredon, et ne doutant pas qu’il est brûlant de fièvre, se retirent en grommelant.

Cette histoire ne me semble pas très héroïque; mais cette génération était au contraire ardemment patriote et venait de se battre à fond contre les allemands. C’était la révolution et la guerre civile contre un gouvernement légitime qui leur faisait horreur, ainsi que la violence et les dévastations.

 Je n’ai pas connu cette grand-maman Dumas morte plusieurs années après ma naissance. Vivant à Paris, et déjà presque centenaire, elle n’est jamais venue à Dieulefit où nous habitions.

 

 

 

Publié dans Jeanne Arnal

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